LE JOURNAL DES MILITANTS CALADOIS

Stationnement à Villefranche : tourner en rond dans une ville qui refuse de changer

Villefranche étouffe. Et pas seulement sous les gaz d’échappement : elle étouffe dans son refus de penser autrement l’espace public. Dans son entêtement à défendre un modèle dépassé — celui du tout-voiture, partout, tout le temps.
Et pendant qu’on refuse d’agir, le stationnement devient un enfer, les nerfs lâchent, et la ville se vide.

Moins de places, plus de tensions

Depuis que les travaux ont déplacé le marché à l’extérieur, une bonne partie des places gratuites du centre-ville ont disparu.
Ajoutez à cela les agents municipaux, qui se garaient autrefois dans le parking souterrain du marché. Maintenant ? Eux aussi doivent trouver une place en surface. Et comme les autres, ils tournent. Résultat : moins de places, plus de voitures, et toujours zéro vision d’ensemble.

Les travaux de voirie n’arrangent rien :
🛠️ Rue de la Paix : une dizaine de places neutralisées
🛠️ Rue Corlin : deux de moins
🛠️ Rue Nationale, rue Paul Bert, rue Victor Hugo, etc.. : interdites pour les résident.es et les travailleur.euses
Sans oublier les événements (marathon, conscrits, braderie…) qui imposent de déplacer son véhicule… mais sans jamais dire où.

Gestion absurde : l’exemple parfait rue Corlin

Exemple criant d’absurdité urbaine : la rue Corlin, au niveau de l’entrée administrative du théâtre.
Autrefois, il y avait là quatre places utiles : trois pour les riverains, et une pour les livraisons. Pratique, efficace, sans fioritures.

Et puis un jour, sans qu’aucun besoin concret ne soit exprimé, des poteaux métalliques ont surgi.
La place livraison a été condamnée. A l’œil, sans plan. Résultat ? Une place et demie perdue pour tout le monde. Une pour de bon, l’autre inutilisable.
Personne ne comprend le pourquoi du comment, et surtout pas les premiers concernés.

Franchement, on ne sait pas si c’est de l’urbanisme ou du freestyle.

Des tanks civils en centre-ville

Et puis, il y a les véhicules eux-mêmes. La taille aberrante de certains 4×4 “urbains” aggrave la situation : chaque SUV prend deux fois plus d’espace, rendant impraticables des places pensées pour des citadines. Mention spéciale au Dodge RAM noir de six mètres qui trône parfois en centre-ville : un véhicule plus long qu’un box de stationnement, plus large que la place laissée aux piétons aujourd’hui..

Et à ceux qui se demandent si ça pose problème : oui. Parce qu’à force de ne rien réguler, c’est l’espace commun qu’on perd.

Quand il n’y a plus de place, c’est la ville qui craque.

Quand les places se raréfient, ce n’est pas juste agaçant. C’est tout l’équilibre de la rue qui s’effondre.

On se gare sur les passages piétons, on mord les pistes cyclables, on monte sur les trottoirs, et surtout, on tourne, on tourne, encore et encore. L’œil fixé sur le moindre pare-choc qui bouge, plus du tout sur les piétons, les gamins, les vélos, tout ce qui rend une rue vivante — et fragile.

Le résultat, c’est une ville où l’on stresse, où l’on s’énerve, où l’on klaxonne.
Une ville où les usagers les plus vulnérables deviennent les plus exposés.
Une ville où chaque déplacement devient une petite épreuve de nerfs.
Et dans cette cacophonie organisée, plus personne ne se parle. On s’évite, on s’affronte, on s’accuse.

C’est ça, le tout-voiture quand on n’a pas de politique claire : un désordre permanent qui se fait passer pour de la liberté.

“Villefranche est une ville médiévale”… et alors ?

Lors du dernier conseil municipal, Benoît Froment, adjoint aux mobilités, a tenté de justifier l’absence d’ambition en matière de transports doux par une déclaration devenue instantanément un classique du genre :

« Villefranche est une ville médiévale, c’est pas toujours facile d’adapter nos voiries à la pratique du vélo. »

Alors déjà, petit rappel historique : au Moyen Âge, il n’y avait pas de SUV.
Pas de parking souterrain. Pas de 4×4 sur les pavés. Pas de Dodge RAM de six mètres.
Ce que Benoît Froment appelle une ville médiévale difficilement adaptable aux modes doux… était à 100 % composée de modes doux.

On s’y déplaçait à pied, à cheval, en charrette ou en âne. Et personne ne s’est plaint d’un manque de bitume pour se garer.

Donc si Villefranche est difficile à adapter au vélo, ce n’est pas à cause de son passé. C’est à cause de son présent.
Ce n’est pas l’héritage médiéval qui bloque : c’est l’inaction contemporaine.

Et le maire, lui, appelle à la “douceur”

Toujours lors de ce même conseil, Thomas Ravier a glissé une critique à peine voilée contre les transformations rapides menées ailleurs :

« Il faut de la douceur dans les transformations. On voit à certains endroits des transformations très rapides qui deviennent parfois très brutales et négatives pour les uns ou pour les autres. »

Mais l’inaction aussi est brutale, monsieur le maire.
Elle l’est pour les piétons en danger.
Elle l’est pour les cyclistes invisibilisés.
Elle l’est pour les habitants qui désertent un centre-ville devenu impraticable.
Elle l’est pour les commerçants qui ferment boutique dans des rues saturées de voitures… mais vides de vie.

Il est temps d’agir

Il faut dire les choses clairement : le système actuel ne fonctionne plus.
On le voit tous les jours : les habitants désertent le centre-ville, les commerces ferment les uns après les autres, et la rue Nationale ressemble de plus en plus à une zone commerciale à ciel ouvert, où seules les grandes chaînes survivent.
À ce rythme, il ne restera bientôt que des banques, des opticiens franchisés, et des vitrines vides.

Et pendant ce temps-là, la mairie temporise, tergiverse, hésite, repousse.
Mais qu’on le veuille ou non, ne pas agir, c’est déjà faire un choix : celui de laisser mourir doucement ce qui fait encore la vie, la singularité et le cœur de notre ville.

Alors à ceux qui dénoncent un “changement trop brutal”, ou qui crient à la “dictature verte” dès qu’on évoque une piste cyclable, on répond que c’est l’inaction qui nous fait mal.
Ce n’est pas le changement qui abîme Villefranche.
C’est son refus.

Il existe des dizaines de pistes. Il suffit de la volonté de les emprunter :

✅ Piétonniser partiellement le centre-ville, le samedi par exemple, pour en faire un espace de promenade et de respiration.
✅ Adapter la tarification du stationnement à la taille des véhicules : un SUV n’est pas une Twingo, ni en surface, ni en impact.
✅ Permettre aux habitant·es du centre-ville d’utiliser leurs abonnements sur les rues centrales
✅ Mettre en place de véritables parkings relais avec navettes régulières, accessibles, gratuites, bien fléchées.
✅ Encourager, organiser et rendre possible le télétravail pour les agents municipaux, pour désengorger la ville.
✅ Et surtout : organiser une concertation réelle, publique, ouverte, sur l’usage de l’espace public.
Parce qu’une ville, ça ne se décrète pas dans un bureau. Ça se construit avec celles et ceux qui la vivent.

Partager l’espace, penser ensemble

L’espace public appartient à tout le monde. C’est un bien commun. Et il mérite d’être pensé collectivement.

Alors je vous invite à faire entendre votre voix. Parce que partager la ville, c’est déjà commencer à la reprendre.

Si vous aussi, vous avez des idées, des colères, des envies : partagez-les. Commentez cet article, venez nous rencontrer en agora.
Parce qu’une ville, ça se construit, et ça se vit.

Reprenons la parole. Reprenons la rue. Reprenons la ville.

Laisser un commentaire

Retour en haut