LE JOURNAL DES MILITANTS CALADOIS

Blédina ferme : le vrai séisme, c’est le capitalisme

Un séisme vient de secouer Villefranche.
Et ce n’est pas un tremblement de terre : c’est l’annonce de la fermeture de Blédina d’ici 2027.
Blédina. L’usine historique. L’odeur des céréales chaudes dans les rues.
Un morceau de notre enfance, de notre mémoire, de notre identité.
Un pan entier de l’histoire ouvrière de Villefranche qu’on s’apprête à arracher au paysage comme on arrache une affiche défraîchie.

Et face à ça, que disent nos élus du Beaujolais ?
“Crève-cœur”… “tristesse”… “fatalité”.
On verse une larme, on fait une déclaration, on secoue la tête… et on rentre chez soi.
Personne ne nomme les coupables. Alors, on va le faire.

Blédina : une usine, une odeur, une ville entière

Blédina, ce n’est pas juste des petits pots :
c’était une partie du décor, au même titre que le marché couvert ou la rue Nationale.

Tout Caladois a grandi avec ce parfum. C’était la signature de la ville. Un monument.
Et pour des élus locaux qui passent leur temps à parler “d’identité”, “d’héritage”, “de traditions”, étonnamment… il n’y a pas beaucoup de virulence quand il s’agit de les défendre vraiment.

Danone : des milliards de profits, zéro loyauté

Blédina n’a pas décidé de mourir. C’est Danone qui l’enterre.

Danone, multinationale aux profits confortables, qui — comme toutes les multinationales — a un principe simple : si ça rapporte moins qu’ailleurs, on coupe. On ferme. On délocalise.
Peu importe ce que le site a représenté, peu importe les décennies de production, peu importe la fierté ouvrière.

C’est la logique du capitalisme pur : on t’utilise jusqu’à la dernière goutte, puis on t’abandonne dans un carton, sans regard en arrière.

La même logique qui célèbre “la valeur travail” mais accable les retraité·es, presse les salarié·es, stigmatise les chômeur·ses, taxe les maladies longue durée, coupe dans les droits sociaux et explique ensuite, la bouche en cœur, que “c’est la faute du contexte”.
Un système qui use les gens quand ils produisent, puis les punit quand ils ne peuvent plus.

Ça ne tombe jamais du ciel.
Ce n’est pas la faute de la “natalité”.
Ce n’est pas la faute d’une “époque”.
Ce n’est pas la faute du “destin”.

C’est un choix.
Un choix politique.
Un choix de modèle économique.

Et nos élus locaux — de droite comme toujours — ont accompagné ce modèle depuis trente ans.

L’emploi local, c’est la vie d’un territoire

Une fermeture comme celle-là, ce n’est pas seulement un drame social : c’est un coup de poignard dans le cœur d’une ville.
L’emploi local, ce n’est pas un concept abstrait : c’est des familles qui restent, des commerces qui tiennent, des trajets courts, une empreinte carbone réduite, des savoir-faire qui ne s’évaporent pas.
C’est tout ce qui fait qu’un territoire vit, respire, se transmet.

Et face à ça ?
Nos élus de droite, toujours prompts à se draper de “patriotisme”, deviennent soudain… très discrets.
Normal : leur patriotisme s’arrête au premier chèque.
Ils aiment la France en discours, mais pour l’industrie française, ils se contentent de communiqués de dépit.
Des chevaliers de la tradition qui, dès que le capital claque des doigts, rangent l’étendard et acquiescent en silence.

Et c’est là que tout se rejoint :
parce que pendant qu’ils agitent des fantasmes de “remplacement”,
la seule chose qui disparaît vraiment, ce sont nos usines, nos emplois, nos vies locales — remplacés par les profits d’un groupe qui ne connaît d’autre nation que l’actionnariat.

Voilà le vrai « grand remplacement » !

Le plus ironique dans tout ça ?
C’est la brèche béante entre ce que les médias et certains responsables politiques hurlent à longueur de journée… et ce qu’ils laissent faire en silence.

On nous explique partout qu’il y aurait un “grand remplacement”, que la France serait “menacée”, que nos “valeurs” seraient en train de disparaître.

Pendant ce temps, le vrai rouleau compresseur, celui qui détruit nos usines, nos emplois, nos centres-villes, nos traditions industrielles, nos solidarités locales, lui… il passe tranquillement.

Pas un plateau TV pour dénoncer le grand remplacement économique.
Pas un édito pour pleurer le grand remplacement industriel.

Et pourtant, qui détruit notre culture ?
Blédina qui ferme.
Les commerces qui meurent.
Les centres-villes qui se vident.
Les loyers qui explosent.
Les emplois stables remplacés par Uber.

Mais pour ça ?
Silence radio.

Quand c’est le capital qui écrase tout, on appelle ça “la conjoncture”.

Un schéma que l’on connait trop bien

  • Étape 1 : désindustrialiser
  • Étape 2 : laisser les multinationales faire la loi
  • Étape 3 : subventionner leur départ
  • Étape 4 : écouter leurs excuses comme si c’était des lois de la physique.

Blédina ne meurt pas.
On la tue.

Et ceux qui jouent aujourd’hui les vierges effarouchées sont les mêmes qui, hier, ont applaudi chaque recul du service public, chaque exonération, chaque cadeau aux multinationales, chaque recul du droit du travail.

Villefranche perd son usine, mais les élus perdent leur masque

Qu’ils ne viennent pas nous dire qu’ils “découvrent” l’ampleur du désastre.
Le désastre, c’est leur modèle.

Et à force de laisser des Danone décider du destin des villes, voilà où on en arrive :
un site historique condamné,
des familles inquiètes,
et un territoire qui se vide de sa substance.

Pour une fois, ne détournons pas le regard.
Ce qui s’effondre à Blédina, ce n’est pas seulement une usine — c’est l’illusion que nos élus protègent encore quelque chose.

Il est temps de reprendre la main

On en a assez.
Assez de ces élus locaux qui se prétendent “défenseurs du territoire” mais qui baissent les yeux dès que le capital parle plus fort qu’eux.
Assez de cette comédie où l’on fait semblant de pleurer des usines que l’on n’a jamais vraiment défendues.
Assez de cette politique qui fait passer les profits avant les vies, les actionnaires avant les habitants, les multinationales avant notre ville.

Si nous ne défendons pas nos intérêts, personne ne le fera à notre place.

Alors oui, il est temps.
Temps d’arrêter de laisser notre avenir entre les mains de ceux qui obéissent à Paris, à Bruxelles ou aux PDG du CAC40.
Temps de construire une puissance populaire locale, une vraie :
celle qui protège l’emploi, qui planifie la transition, qui soutient les travailleurs,
celle qui refuse de laisser le Beaujolais devenir un décor vide pour touristes et investisseurs.

La ville n’appartient pas à Danone.
Elle n’appartient pas aux financiers.
Elle n’appartient pas aux élus qui capitulent.
Elle nous appartient.

Et quand un peuple décide de reprendre ce qui est à lui…
même les géants apprennent à trembler.

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